We are not the same anymore

"Quels que soient les obstacles qui se mettent au travers de ton chemin, tu dois apprendre à les contourner ou les abattre pour continuer à avancer". Voilà ce que j'ai dit à mon Premier Sortcelier lors de notre première rencontre. De belles paroles, sincèrement pensées. Mais suis-je réellement capable de les suivre? Pour la première fois de mon immortalité, je doute. Pas de moi, mais des autres. Ceux qui veulent me protéger m'étouffent. J'ai besoin de partir, de faire le point loin de ma famille et de ces autres qui me craignent, me fuient, aveuglés par leurs préjugés et leur manque de bravoure. Je suis entourée d'êtres aussi ennuyeux qu'un champs de sopor. C'est désespérant.
Je me suis donc décidée.

Il y a quelqu'un que j'ai besoin de retrouver. Avec lui, je sais que je ne m'ennuierais pas. Et peut-être...

D'un geste sec, Rubissandre referma son journal, avant de le glisser dans la poche de sa robe de sortcelière. Bien que son visage soit toujours aussi désespérément froid, quelqu'un d'observateur aurait remarqué qu'il y avait quelque chose dans son regard -dont la couleur rubis brillait plus intensément que jamais- et dans son comportement qui n'était pas habituel. Elle marchait d'un pas décidé dans les couloirs du Château Vivant, Stell'en suivant laborieusement son rythme; ses doigts tapant à une vitesse effrénée des PMM pour son grand-père et son père : "J'ai besoin de prendre du recul. Je pars quelque temps. Ne vous inquiétez pas." Elle avait du jouer de ses relations pour faire croire qu'elle partait en voyage au travers des régions de Vilain, sinon tous se seraient interposés entre elle et son but. Les questions administratives à régler avaient été plus longues que prévues, ce qui expliquait sa presque course à travers le Château -mais elle préférait suivre la voie de la prudence, car le Château Vivant lui aurait forcément joué un tour si elle avait courut. Or, elle n'avait pas le temps. Bien sur, des minutes n'étaient rien comparées à trente années de séparation. Mais Ruby n'avait plus la patience de quoi que ce soit.

Enfin, elle s'engouffra comme un tourbillon bleu et argent dans la salle de Transfert; passant sans scrupule devant les quelque dizaines de gens qui attendaient déjà. Sa robe de Mage et sa réputation suffisaient à ce que nul ne s'oppose à elle, et si par malheur quelqu'un osait lui dire quoi que ce soit à propos du fait qu'elle venait d'éviter une demi-heure de queue, elle savait que son regard suffirait à le faire taire. Les avantages d'être une vampyre doublée d'une Mage et de la petite fille de Safir Dragosh!

Sans attendre les conseils du gardien -elle n'était pas une touriste!- Ruby attrapa le sceptre et s'exclama d'une voix claire brûlant d'impatience.

« Tatumalenchivar, Acroké!!! »

∞ ∞ ∞ ∞ ∞ ∞

Par Sacatach!!!
Ruby posait un regard brillant d'émotion sur le paysage qui s'étendait sous elle. Son cœur battait à tout rompre alors qu'elle vivait réellement ce qu'elle ne pouvait voir qu'en rêve depuis des années. Acroké la belle était là, vivante, animée, belle dans sa différence. Car tout était différent ici. La chaleur du soleil couchant la faisait se sentir réelle, l'air vibrait de tout ce qui faisait qu'elle aimait cet endroit : la liberté. Autrefois les loups-garous avaient combattus pour obtenir leur indépendance, et ils avaient vaincus; le Tatumalenchivar était donc pour elle le bastion de la liberté, son symbole le plus fort. Et Ruby avait toujours eu l'impression que le pays gardait cela en lui, sauvagement, indéfinissablement libre et indépendant -tout comme celui qu'elle recherchait.

Elle s'était débarrassée de sa robe de sortcelière, dissimulée dans la sacoche en cuir qui pendait à son côté. Elle se sentait presque nue sachant que la majorité de son matériel était rangé dans les poches de sa robe; mais étant donné qu'elle était censée être à Vilain, parader avec une robe des sortceliers du Lancovit à l'autre bout d'AutreMonde n'aurait pas été d'une grande discrétion. A la place, elle était juste vêtue d'une combinaison noire. Et alors qu'elle marchait tranquillement dans les rues de l'artère principale, redécouvrant d'un regard plein d'admirations la ville, elle se rendait compte qu'elle ne pourrait pas cacher bien longtemps sa présence en ville. Pourquoi? Peut-être parce qu'une vampyre à la peau blafarde et aux yeux rouges détonait quelque peu par rapport aux loups-garous bronzés et taillés comme des guerriers avec en moyenne deux têtes de plus qu'elle.... Et dire qu'elle était considérée comme grande par ses pairs, ici, elle se sentait quelque peu rétrécie...!

Les heures passaient, et Ruby n'en avait pas la moindre conscience, éblouie par tout ce qu'elle voyait. L'attraction de la curiosité effaçait pour quelques temps ses doutes et ses inquiétudes, ne laissant que la Ruby passionnée plus que tout au monde par un peuple, un pays, un rêve.

Stell'en la fit revenir de son escapade intérieure de la façon la plus brutale possible. D'un coup, des cris fusèrent de tout autour, et elle fut submergée par une vague de frayeur sans nom : Stell'en s'était sentit menacé par un loup-garou qui s'était trop approché..... Et par réflexe d'autodéfense, ils l'avait avalé tout cru.
Par tous les démons des Limbes!!!!!!!!

Ruby, noyée sous le flot de panique de son Familier, perdit tout aussi radicalement tout contrôle et se transforma en une grosse louve noire. Slurk!! Elle avait recommencé.
La louve s'interposa entre son Familier et les passants qui croyaient que le krakdent avait attaqué l'un des leurs -alors qu'il s'était juste défendu. Ce terrible quiproquo risquait de lui coûter très cher, elle en avait parfaitement conscience; malheureusement depuis qu'elle s'était liée avec Stell'en elle n'en était pas à sa première expérience du genre. Un Familier effrayé par absolument tout et n'importe quoi (sauf elle) et qui gobait instinctivement tout ce qui lui faisait peur.... Forcément, c'était délicat. (encore heureux qu'elle ne portait pas la robe du Lancovit au moment des faits, ou elle aurait risqué un accident diplomatique!!)

Ruby tenta d'envoyer des ondes calmantes à Stell'en. Dans ces moments-là (ou il était hystérique), elle n'arrivait même pas à lui parler mentalement, il fallait qu'elle trouve des images rassurantes, qu'elle ressorte d'elle-même des émotions positives : vague d'amour, de confiance.... Difficile à faire quand on était menacé par une foule agressive. Alors merci au fameux sang-froid que lui avait légué son père, et qui lui permettait de s'isoler du reste du monde pour trouver une solution.
Mais son familier était sourd à ses supplications. Sa fourrure rose était parcourue de tremblements incontrôlables, et ses grands yeux dorés étaient paniqués....
.... Et comme s'il n'avait pas déjà fait assez de choses surprenantes pour aujourd'hui, il rouvrit son immense bouche et recracha l'homme-loup avalé un peu plus tôt. Homme qui fut projeté à quelques mètres, entièrement recouvert de bave de krakdent.

Oups.
Pas bon ça. Peut-être qu'on ne pouvait plus accuser son familier d'être un mangeur de loup psychopathe, mais maintenant, elle avait un loup-garou en colère sous les bras. Loup-garou vraiment très très en colère même, puisqu'une fois remis du choc d'avoir été avalé par une peluche rose il se transforma en une énorme bête bien plus grosse que Ruby.
Donc son oups mental était tout à fait compréhensible.

« Monte!! » Elle ordonna mentalement à Stell'en, s'allongeant pour qu'il puisse s'accrocher difficilement de ses minuscules pattes à la fourrure noire de Ruby-louve. Sitôt fait, elle se releva et se mit à courir pour échapper au loup-garou -oh, elle avait parfaitement confiance en ses capacités mais elle ne pourrait pas se défendre sur cette place bondée, et elle devait mettre Stell'en en sécurité. Et puis, elle répugnait un combattre un loup-garou, ni n'importe qui d'autre d'ailleurs : Ruby préférait la voie de la diplomatie à la violence; or les combats ne menaient qu'à la haine, la méfiance et les préjugés. Et c'était justement ce contre quoi elle luttait le plus ardemment.
Elle tentait de se faufiler entre les jambes des badauds, mais impossible d'être discrète ni très rapide avec un krakdent rose pétant accroché sur le dos. Bien, il ne restait qu'une solution pour échapper à son poursuivant : un Transmitus. Mais pour cela il fallait qu'elle ait le temps d'incanter.... et de se retransformer.

La louve s'engagea dans une rue adjacente, prête à profiter de ses quelques secondes d'avance sur son poursuivant pour accomplir son plan... Mais alors, elle se figea.

Sous sa forme de louve, son odorat devenait aussi développé que celui de l'animal. Si bien qu'elle était capable de reconnaître toute odeur qu'elle avait un jour sentit.... Et là, derrière celle de la peur, de la colère, de l'agressivité, il y avait.... Clay.
Ruby releva les oreilles, et malgré les plaintes mentales de Stell'en commença à jeter des regards rouge sang tout autour d'elle, espérant apercevoir celui pour qu'il elle avait prit tant de risques à venir chercher....

Mais derrière elle, le loup-garou en colère les avaient rattrapés....

« En quoi est-ce mal d’avoir un rêve ? » « Ce n’est pas une rêve que tu as là, mais une absurdité ! » « Ben voyons, tu n’as qu’à dire que je suis aussi stupide qu’un spatchoune pendant que tu y est ! » « Ne me tentes pas jeune loup ! » « Un jour je prendrais ta place et nous verrons qui seras le plus spatchoune d’entre nous. » « Commences déjà à apprendre le respect avant de souhaiter le pouvoir. Chaque chose en son temps. » « Mais j’en ai marre d’attendre ! » « Cela suffit Clay ! J’en ai assez de t’entendre geindre de la sorte ! » Le chef de meute s’en alla, comme pour signifier que la conversation était close. Clay se mordit la lèvre inférieure d’agacement. Qu’est-ce qu’il pouvait être énervant comme père ! Grrr… Cela faisait cinquante ans qu’il faisait partit de ce monde, il était temps de lui offrir ce à quoi il était destiné. Être le second ne lui convenait pas. Il était toujours relégué au « jeune Adamson », celui qui s’impatiente. Son frère, le surnommé « petit Adamson » n’en avait que faire du pouvoir, Clay était donc le tout désigné. Et pourtant, le voilà toujours et encore à attendre. C’était sûrement la millième fois qu’il s’engueulait avec son père à ce sujet et cela n’allait pas être la derrière, loin de là ! Dans son coin, en toute discrétion, Clay réunissait des hommes et des femmes (surtout des femmes d’ailleurs) à sa cause. Il passait ses journées à cherchait des loups et des louves sur tout le continent. Il les observait, les épiait, les analysait et les contactait lorsqu’il pensait être tombé sur quelqu’un avec assez de potentiel. C’était une sorte de marché du recrutement. Et cela fonctionnait assez bien il fallait se l’avouer. Une dizaine de personnes étaient prêtes à s’engager dans sa future meute. Clay était ravi, mais pour lui, cela n’était pas suffisant, non, pas encore. Il devait rallier davantage de loups à sa cause. Plus nombreux ils seront et mieux cela sera. Après tout, s’ils étaient assez nombreux, Clay pourrait créer sa propre meute en cassant quelques codes lycanthropes, mieux encore, il aurait l’occasion d’organiser un coup d’état et de devenir le loup alpha … Le rêve. L’appel du pouvoir et tous ces projets encourageaient Clay à aller toujours plus loin et à devenir toujours plus fort ? Être chef de meute, une belle ambition. Enfin, d’après lui, car tous ne semblaient pas être de cet avis, et surtout pas son père. Tant pis, il avait un objectif. Il allait tout faire pour l’atteindre, coute que coute ? Bref … vous l’avez compris, ce loup-garou a énormément d’ambition, peut-être même trop.
Désormais seul au beau milieu de la rue, Clay, les yeux fermés, appréciait sentir les rayons de chaleur et de lumière qui frappaient agréablement son visage. Un  simple jean clair et un t-shirt mauve le recouvraient faisant ressortir sa chevelure de jais. Après tous les voyages qu’il avait entreprit sur AutreMonde, le Tatumalenchivar était sans nul doute le lieu qu’il préférait. D’abord parce que c’était chez lui et qu’il y retrouvait ses semblables, mais aussi car ce continent ne ressemblait en rien aux autres de la planète. La ville d’Acroké était réputée pour sa bonne humeur et la joie de vivre que témoignaient ses habitants. Cela ne ressemblait en rien aux autres capitales. Elle se distinguait tellement et de façon radicale. Le Tatumalenchivar était une sorte de destination de vacances très prisée par les AutreMondiens, pour profiter du soleil, changer de décor et être bien accueilli. Cela devait être bien différent de la Krasalvie, qui irait en vacances chez les vampyrs ? Peu de personnes, c’était sûr. Clay eu un léger sourire à cette pensée. A une époque, il s’y rendait très souvent chez les vampyrs. La plupart du temps c’était pour accompagner son père en rendez-vous politique, ce dernier était très proche de la famille Dragosh, notamment du père, le président de la Krasalvie. Mais maintenant, cela faisait trente ans qu’il n’y avait plus mit les pieds, et la vérité, c’était que cela lui manquait, elle lui manquait … Le temps passait si vite, les trente ans avaient défilés sans s’en rendre compte. Vivement qu’il prenne le pouvoir, il irait où il voudrait et quand il le souhaiterait. Oui, vous l’aurez compris, Clay est obstiné par cette ambition de pouvoir. *Bon, un petit tour sur la place pour guetter les nouvelles cibles* pensa-t-il avant de s’engager le long de la rue principale. Les nouvelles cibles pour le recrutement, pas pour tuer hein. Clay ne tue pas, il se bat et frappe, mais ce n’est pas un assassin, non. Il préfère laissait cette tâche aux spécialistes, notamment à Anya, qui étrangement semblait apprécier plus que la normale ôter la vie d’autrui. Cette louve l’intriguerait toujours…

PIF, PAF, POUF !! (Si vous reconnaissez ce bruit vous êtes trop forts !). Les deux fesses à terre, le jeune Adamson venait de se faire percuter et envoyer au tapis de façon violente. Deux loups étaient passés en trombe, dont un avec un truc rose très étrange et l’autre le pourchassant. Ils disparurent dans une ruelle. Clay ne mit pas énormément de temps pour réfléchir. Il fallait examiner de plus près ces deux loups ! (Comment ça il pense qu’à sa meute !? #PAF#). Se relevant rapidement, il entreprit de les suivre. Sans se transformer, Clay escalada une des maisons proches de lui pour se hisser sur le toit et apercevoir plus facilement la course-poursuite qui se déroulait sur la terre ferme. Il n’était pas très haut, à deux ou trois mètres environ, il était visible mais il s’en fichait, à vrai dire il ne cherchait absolument pas à se cacher. Cette position lui permettait d’être le guetteur parfait. Jouant de sa force naturelle, il courait, sautait, se réceptionnait avec une agilité et une rapidité qui pourrait déconcerter plus d’un humain. Mais les deux loups transformés étaient plus rapides, commençant à distancer petit à petit, Clay devait jouer avec les toits pour tenter de perdre le moins de terrain possible. Ces deux là commençaient à bien lui plaire. Tournant dans une petite rue, le premier des deux loups se stoppa net, c’était étrange. Le deuxième n’allait pas tarder à le rattraper, d’ici quelques secondes à peine, alors pourquoi s’arrêter ainsi ? Clay eu à peine le temps de descendre de son toit pour s’interposer entre les deux loups. Jamais il ne refuserait un combat ! Le loup qui venait de débarquer semblait ultra supra énervé. Clay le regarda dans les yeux, un sourire naissant sur son visage. S’il voulait se battre, il suffisait de demander. L’excitation d’un nouveau combat parcourait les veines du jeune loup tel une forte adrénaline. Dans son dos, la louve semblait immobile, Clay ne ressentait aucuns mouvements, mais il sentait le regard posé sur lui. Cette silhouette lui disait quelque chose, il ne savait pas encore quoi, mais il était persuadé de la connaître.